RÉFORMER LES INSTITUTIONS EUROPÉENNES

 

 

Il faut bien distinguer et opposer deux concepts fondamentaux : la gouvernance d’une part, la démocratisation des institutions d’autre part. Le terme de démocratie est souvent utilisé avec différents sens. L’administration américaine par exemple va faire la promotion d’une démocratie en Irak, entendons un modèle de gouvernement d’apparence démocratique mais visant en fait à maintenir des intérêts privés dans un contexte néo-libéral. Et que dire de ces pays "démocratiques" qui manient le mensonge avec autant de facilité et d'aplomb ? Face à son déficit démocratique, l'Europe a besoin d'une démocratisation en profondeur de ses institutions, non d'une simple gouvernance.

 

Le concept de gouvernance, avancé par la Commission européenne, vise à aménager le triangle institutionnel. C’est une simple mise à jour pour adapter les institutions à un système économique et à l’esprit néo-libéral des traités, tel l’ouverture des services publics à la concurrence, et la marchandisation de l’éducation, de la santé et de la culture, ainsi que le prévoit l’Accord général sur le commerce des services (AGCS) de l’OMC. Mais l’objectif de la Commission reste de garder le monopole de proposition dont  les Etats ne pourraient s'en départir à moins d’un vote contre la Commission à l'unanimité, d’étendre son pouvoir pour devenir le gouvernement de l’Europe avec des compétences tant au niveau économique que politique et diplomatique. Bien entendu, cette extension des pouvoirs que réclame la Commission ne s’accompagne pas d’une remise en question de son propre mode de fonctionnement. Dans cette logique, la Commission ne veut pas d'un président de l'Union européenne. La gouvernance consiste en un système d'apparence démocratique. La gouvernance s'inspire directement de la "corporate governance", la gouvernance d'entreprise, qui consiste en l'ensemble des dispositifs institutionnels permettant de contrôler les dirigeants d'entreprise pour veiller aux intérêts des actionnaires. Transposée à des institutions politiques, la gouvernance vise à aligner le comportement des politiques sur l'intérêt des multinationales.

 

La démocratisation des institutions, qui nous intéressera ici, s’inscrit dans la logique de l’histoire de l’Europe et de sa finalité. Démocratisation rime ici avec humanisation. Elle vise à mettre en place un système organisationnel pour l’intérêt des citoyens, avec une structure fédérale modeste (respectant le rôle des États dans leur domaine de compétence) mais efficace. Elle passe par un Traité qui définit à la fois les buts de la construction européenne et les modalités de l’organisation du pouvoir, en rupture avec Maastricht (Amsterdam, Nice, le TCE) et la structure en trois piliers destinée à disparaître. Ce nouveau Traité, remplaçant les traités actuels, devrait permettre de mettre en cohérence les principes et les actes (voir les doubles contraintes). L'Union européenne devrait recevoir une personnalité juridique propre (c’est le cas avec le TCE). Bien entendu, cette démocratisation des institutions s’inscrit en rupture avec le traité de Maastricht et avec la globalisation économique, pour revenir aux sources éthiques de la mondialisation, aux fondements de l’Europe et à sa finalité, avec comme fil conducteur le polycentrisme, le concept de la double-démocratie, et le principe de la conjonction des opposés. Cette mutation à l’échelle de l’Europe serait un préalable à une véritable réforme de l’ONU.

 

Si les réformes ici proposées s'inscrivent en accord avec la finalité de l'Europe, elles resteront un cadre théorique, actuellement utopique, dans la mesure où les mentalités ne sont malheureusement pas prêtes à un changement radical. Il s'agit d'une démarche prospective et il est clair que mon propos n'est pas de proposer un bricolage institutionnel pour uniquement faciliter le fonctionnement d'une Europe (version Maastricht, Nice ou TCE) à 25 et plus.


Les réformes ici proposées se rapprochent du modèle fédéral coopératif décentralisé qui a inspiré le second projet de Constitution de l'Union européenne (rapport Herman de 1994) et du modèle fédéraliste régional du même rapport. Il n'est pas question d'un véritable État fédéral, à savoir le modèle fédéral pur du rapport Herman où la Commission deviendrait le gouvernement fédéral.


Enfin,  il faut souligner qu'il est impensable d'envisager un véritable budget européen digne de ce nom en l'absence d'une réelle démocratisation des institutions, les institutions européennes devant avoir au moins la même exigence démocratique qu'un Etat européen.



 

Affirmer l’éthique de l’Europe

 

Le Conseil de l’Europe incarne les valeurs et idéaux de notre civilisation, progrès économique et social conjointement. Dotée d’une personnalité juridique, l’UE devra ratifier la convention européenne de sauvegarde et la charte sociale européenne révisée. Affirmer l’éthique de l’Europe suppose également :

·        renforcer le rôle du Groupe d'action financière (GAFI) 

·        supprimer la douzaine de paradis fiscaux présents sur le territoire européen

·        une reconnaissance par tous les pays européens de la Cour internationale de justice et de la Cour pénale internationale.

·        que la diplomatie préventive et la prévention des conflits soient renforcées.

·        que les États membres harmonisent progressivement leurs législations pour un espace de liberté, de sécurité et de justice.

 

Se pose également la place de la Russie en raison des nombreuses exactions en Tchétchénie. Mais au-delà de ce problème éthique, la Russie (tout comme les Etats-Unis) n’a pas vocation à intégrer l’Union européenne, pas plus que l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Géorgie, tous pays membres du Conseil de l’Europe (reste le problème de l’Ukraine). On peut également se demander quelle est la place des pays observateurs tels le Canada, le Japon, le Mexique, Israël et les Etats-Unis (ces derniers souhaiteraient même un poste d’observateur au sein des institutions européennes).

 

Assurer la défense de l’Europe

 

La politique européenne commune de sécurité et de défense  (PESD) doit être indépendante de l’OTAN. Se pose donc la question de la disparition de l’OTAN, et par delà, de l’OSCE et du CPEA.

 

Une Cour de justice économique et sociale

 

Le développement durable vise à conjuguer l’économique, le social et l’écologie. Mettre sur le même plan le principe de concurrence et le principe de solidarité (avec la notion de services publics qui en découle) implique de renommer la Cour de justice en Cour de justice économique et sociale. Ceci permettra d’harmoniser la jurisprudence de la Cour de justice et de la Cour européenne des droits de l’Homme.

 

Il s’agit de préserver les services publics communautaires tout en améliorant leur fonctionnement, et de protéger l’environnement (Agence européenne de la sécurité alimentaire, Projet Galileo de navigation par satellites, Agence européenne pour la sécurité maritime, agence européenne pour la coordination du trafic aérien...). Il faut au préalable une reconnaissance par le nouveau Traité de la notion de services publics (la Commission ne parle que de service d’intérêt général) conjointement au principe de concurrence. Ces services publics sont fondés sur les principes de l'universalité, de l'égalité d'accès, de la tarification équitable, de la qualité, de la sécurité et de la justice sociale.

 

Réformer le Comité économique et social

 

Le Comité économique et social doit trouver une place centrale au sein du processus décisionnel, au même titre que le Comité des régions. Une réforme du Comité économique et social passerait par une recomposition de trois groupes du fait de l’élargissement de la composante économique et sociale à la composante environnementale et humaine :

1.     Tissu économique et social, avec trois sous groupes : employeurs, travailleurs, et activités diverses (agriculteurs, PME et artisanat, professions libérales, coopératives et mutuelles)

2.     Protection de la santé et de l’environnement (ONG ou associations de défense des consommateurs, de l’environnement, du développement durable, des familles, des handicapés)

3.     Comité d’éthique (représentants de diverses religions, de la communauté scientifique, médicale, du corps enseignant, de la magistrature, représentants du Conseil de l’Europe)

 

Le lobbying s’exercerait au niveau du Comité économique et social, et uniquement auprès de cette institution, non auprès des commissaires ou des parlementaires.

 

Le Sénat, ou Chambre des Médiateurs

 

Le Sénat serait composé de représentants des Etats (c’est-à-dire l’ex-Conseil), des Parlements nationaux, du Comité des régions, et du Comité économique et social. Il pourrait être également nommé Chambre des médiateurs, ou Chambre de subsidiarité. Cette Chambre représenterait la Société Civile (le Comité économique et social), les Etats et les régions. Les membres du Conseil économique et social et du Comité des régions devraient être des élus et non des fonctionnaires nommés.

Une triple majorité devrait se dégager.

1.     A l’ex-Conseil serait attribué une voix par Etat. La règle de l’unanimité étant supprimée, la simple majorité des pays serait requise. Il siègerait en public lors de son travail législatif.

2.     La majorité de la population de l’Union européenne devrait émerger au sein du Comité des régions selon une pondération des voix proportionnelle à la racine carrée de la population (voir Comité des régions). Ceci permettrait un vote formel des représentants des citoyens au niveau local, à la différence du simple calcul mathématique du système de double majorité (majorité des États représentant la majorité de la population).

3.     Cette double majorité classique serait complétée par un vote à la majorité au Comité économique et social (représentant donc la société civile).

Dans certains domaines sensibles (politique étrangère par exemple), une majorité des deux-tiers, des États et de la population, serait requise.

 

Le Sénat élirait trois Médiateurs (je garde ici provisoirement des noms en référence à des concepts psychanalytiques jungiens).

 

Le Médiateur « Mercure » présiderait la Banque centrale européenne, la Cour des comptes, la BERD, l’office de lutte antifraude indépendant (OLAF). Il serait le garant d’une relative stabilité des prix, mais son rôle ne se limiterait pas au contrôle de l’inflation. Il serait responsable de la coordination des politiques monétaires, budgétaires et fiscales avec une convergence (c'est-à-dire une certaine harmonisation) de la fiscalité des entreprises pour éliminer la concurrence fiscale (rappelons qu'une majorité de pays dans l'Europe à 25 s'oppose à une telle mesure). Au niveau de la politique budgétaire, il s'impose de synchroniser la période budgétaire (2007 - 2013) avec la législature parlementaire (2009 - 2014), le décalage actuel conduisant à l'impuissance et au conservatisme. Au lieu de se contenter d’un traitement social du chômage (emplois jeunes, travail précaire, emplois flexibles ou précaires...), la politique économique et monétaire serait conçue comme un instrument pour favoriser la croissance et lutter contre le chômage, selon le monétarisme proposé par Maurice Allais et Hamilton (la croissance de la masse monétaire est nécessaire à la croissance, la croissance de la masse monétaire doit être adaptée, elle peut en effet être génératrice d’inflation uniquement dans le cas d’une création monétaire excessive par rapport au potentiel de croissance de l’économie). De grands travaux pourraient ainsi être financés par la politique monétaire, contribuant à la relance économique et au rattrapage de la partie centro-orientale par rapport à la partie occidentale de l'Europe (objectif qui autoriserait à terme une pleine libéralisation des services sans risque de dumping social).  L’indépendance de la Banque centrale empêcherait tout contrôle du pouvoir politique ou le financement des déficits budgétaires par une création monétaire génératrice d’inflation. Mais le Médiateur Mercure serait responsable devant la Chambre des médiateurs.

 

Le Médiateur « Senex » présiderait la Cour de justice économique et sociale (le nombre de juges, nommés d’un commun accord entre les chefs d’Etat et de gouvernement, serait limité, mais tous les Etats membres pourraient être représentés en tenant compte également des avocats généraux). Il présiderait également une direction générale pour la planification-programmation industrielle à long terme, la prospective, la réflexion sur les institutions et les négociations pour les élargissements. Il pourra être saisi par tout citoyen ayant à se plaindre du mauvais fonctionnement d’une institution de l’Union européenne, reprenant ainsi les fonctions de l’actuel Médiateur. S’il existe un Parquet européen, on ne créerait pas pour autant une juridiction de jugement : les jugements seraient rendus devant les tribunaux nationaux compétents.

 

Le Médiateur « Puer » présiderait une Commission de la communication (télévision, presse et médias). Il veillerait à la liberté de l’information. Il serait une autorité morale responsable de la qualité de l’information et de la diffusion du savoir, en particulier par le développement d’une télévision européenne, d’une chaîne d’information continue, et la promotion de l’industrie audiovisuelle. Il aurait une mission culturelle visant à l’élaboration de programmes européens. Il devrait contribuer à la connaissance et à la diffusion de la culture et de l’histoire des peuples européens, comme au développement de programmes audiovisuels européens. Il encouragerait les échanges culturels, la création artistique et littéraire, et la coopération entre Etats membres. Il stimulerait la création d’un espace culturel européen, le développement d’une conscience et d’une identité culturelle européenne, avec le soutien de la participation des citoyens à un projet collectif. Il favoriserait des coopérations scientifiques dans les programmes nationaux et assurerait la mise en œuvre d’une politique commune de recherche (en particulier le développement des énergies renouvelables et de la recherche scientifique dirigée vers les problèmes écologiques) en proposant un programme cadre d’après les travaux des comités d’experts, des comités consultatifs spécialisés et de la direction générale chargée de la recherche et de la technologie.

 

Un Président et un Chancelier à égalité de pouvoir mais à compétences spécifiques

 

Le Président et le Chancelier seraient élus par le Parlement européen, et non désignés par le Conseil européen. Ils tireraient ainsi leur légitimité des élections au Parlement européen (dont les membres devraient être élus par des listes transnationales avec une procédure uniforme dans tous les pays).

 

Le Président aurait en charge le commerce, les affaires économiques, les entreprises, le marché intérieur et la concurrence, l’agriculture, la pêche et le développement rural, les transports, les télécommunications et l’énergie, la coopération policière et Eurojust (unité composée de procureurs et d'officiers de police, prélude à un véritable Parquet européen, avec comme objectif l’organisation d’un espace judiciaire commun et l’unification des procédures pénales pour protéger l’Europe contre la fraude, la corruption, le terrorisme et la criminalité), les relations extérieures, la diplomatie et la défense (une défense européenne autonome, indépendante de l’OTAN). La structure actuelle en trois piliers disparaîtrait.

 

Le Chancelier aurait en charge la santé et l’environnement, l’emploi et les affaires sociales, les services publics, la protection des minorités, la protection civile, l’immigration, l’aide humanitaire. Le terme de Chancelier fait référence au Matricien de la double-démocratie. C'est un nom a priori plus approprié même s'il peut faire référence à diverses fonctions : chef de gouvernement, ministre des finances, garde du sceau royal, directeur d'hôpital, recteur d'université.

 

Plusieurs types d’indicateurs reflèteraient cette séparation des pouvoirs :

Le taux de croissance, de chômage, d’inflation, de morbidité, d’accès aux soins, d’accès au logement, d’échec scolaire, l’indice de pollution.

 

Le Conseil fédéral européen

 

Le Président, le Chancelier, le Président du Parlement, le Président du Sénat, les trois Médiateurs, les chefs d’Etat ou de gouvernement se réuniraient régulièrement au sein d’un Conseil fédéral européen destiné à remplacer le Conseil européen. Les États seraient donc représentés à ce Conseil fédéral. Le principe de subsidiarité s’exercerait en amont, au niveau du Conseil fédéral européen, et en aval, au niveau du Sénat, ou Chambre de subsidiarité. Le Président, le Chancelier et les trois Médiateurs présideraient ce Conseil fédéral (ils devront être issus de façon équilibrée d'euro-régions différentes et de grands États). Ils auraient un rôle d’impulsion, d’orientation, d’animation, de coordination, tout en étant les garants des principes de la finalité de la construction européenne.

 

Réformer la Commission

 

La Commission représente l’intérêt communautaire, sa mission est donc en particulier de favoriser la coopération et coordination entre États et euro-régions. Autant le Sénat (Chambre des médiateurs, ou Chambre de subsidiarité) représente les États, les régions et la société civile, et s’organise donc sur le principe d’égalité entre pays (une voix par État, grand ou petit), autant la Commission doit refléter l’organisation polycentrique de l’Europe, de même que le Parlement européen est structuré non pas sur des groupes parlementaires nationaux mais sur des groupes politiques européens.

 

La Commission doit être dénationalisée (rappelons que tous les pays sont représentés en permanence au niveau du Conseil fédéral européen et du COREPER), chaque commissaire oeuvrant pour favoriser le polycentrisme intra-européen, et non pour défendre les intérêts de son pays d’origine (les pays non représentés à la Commission pourraient se réunir régulièrement avec les commissaires de leur euro-région correspondante, en particulier lors des réunions du COREPER). L’organisation de la Commission doit refléter la structuration de l’Europe en zones géographiques et/ou anthropologiques. La taille de la Commission doit être réduite pour préserver son efficacité. Le nombre d’une quinzaine de commissaires représente un chiffre maximum.

 

La répartition des commissaires se ferait par grands ensembles de population (grand pays ou euro-région) pour représenter le polycentrisme d’une l’Europe parvenue au terme de son élargissement (ce polycentrisme a vocation à remplacer l’axe franco-allemand ou toute tentative de directoire à 3 ou 5 grands États). Ces euro-régions permettraient par ailleurs de résoudre plus facilement le problème des minorités en Europe centro-orientale et balkanique. L’organisation suivante représente une proposition visant à assurer une représentation équilibrée entre Europe occidentale et orientale, région baltique et méditerranée occidentale (dans ce schéma, on peut discuter sur la place de l'Irlande dans la zone de l'arc médian, de la Suisse aux Pays-Bas, zone où coexistent différents systèmes familiaux avec en particulier la forme hybride de la famille souche incomplète, mais il existe de fait dans ce pays coexistence de la famille souche avec, non pas la famille nucléaire égalitaire, mais la famille nucléaire absolue) :

 

Finlande, Suède, Norvège, Estonie, Lettonie, Lituanie, Danemark      

2 commissaires

Pologne, Hongrie, Tchéquie, Slovaquie, Autriche, Croatie, Slovénie

3 commissaires

Suisse, Pays-Bas, Belgique, Luxembourg, Irlande

2 commissaires

Chypre, Malte, Grèce, Albanie, Macédoine, Bulgarie, Roumanie, Bosnie, Serbie, Monténégro     

 

3 commissaires

Espagne, Portugal

1 commissaire

France

1 commissaire

Royaume-Uni

1 commissaire

Allemagne

1 commissaire

Italie

1 commissaire

Turquie

1 commissaire

                                                                               Soit 16 commissaires

 

 

La Commission deviendrait un organe purement administratif, dépolitisé, responsable devant le Conseil fédéral européen et le Parlement européen, et serait scindée en cinq unités. Cette scission de la Commission en cinq sous unités permettrait une meilleure efficacité des travaux préparatoires, les décisions se prenant en réunissant l’ensemble des commissaires. Le président de la Commission n’aurait pas de fonction politique mais comme mission spécifique d’assurer la communication et la coordination entre les différentes sous unités de la Commission. La Commission étant un organe supra-national (peut-être vaudrait-il mieux utiliser le terme trans-national), son président devrait tout naturellement être choisi par les cinq représentants du pouvoir (Président, Chancelier, et les trois Médiateurs) avec l'aval du Parlement européen.

 

Les cinq unités seraient les suivantes :

 

Une sous la responsabilité du Chancelier avec 3 commissaires :

·        santé et environnement,

·        services publics, emploi et affaires sociales,

·        protection des minorités, protection civile, immigration, aide humanitaire.

 

Une sous la responsabilité du Président avec 3 commissaires :

·        commerce, affaires économiques, entreprises, marché intérieur et concurrence,

·        agriculture, pêche et développement rural,

·        coopération policière, relations extérieures et défense.

 

Une sous la responsabilité du Médiateur « Mercure » avec 4 commissaires :

·        affaires monétaires, affaires financières, fiscalité, investissements

·        budget, contrôle financier, lutte contre la fraude, évaluation de l’efficacité administrative coordination,  communication interne à la Commission,

·        transport, télécommunications et énergie,

·        coopération entre euro-régions, politiques régionales.

 

Une sous la responsabilité du Médiateur « Puer » avec 3 commissaires :

·        sciences, recherche, créativité, innovation,

·        culture, traduction, eurostat, office des publications,

·        médias et société de l’information.

 

Une sous la responsabilité du Médiateur « Senex » avec 3 commissaires :

·        justice et affaires intérieures, service juridique interne,

·        développement durable,

·        groupe des conseillers politiques.

 

soit 16 commissaires.

 

(signalons un avis de la Commission européenne en septembre 2003, en réaction aux travaux de la Convention, qui suggère de garder un commissaire par État membre mais propose de structurer le collège par petits groupes d'au moins sept membres, lesquels prendraient des décisions en amont sur des sujets précis, tout en gardant des réunions à 25 sur les questions « les plus importantes »).

 

 

Le droit d’initiative

 

Il serait attribué au Parlement européen, au Sénat, au Conseil fédéral européen. Tous les membres de ces trois institutions bénéficient d’une légitimité démocratique.

 

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La crise irakienne est encore venue le confirmer, les divergences entre pays européens sont telles que ce projet d’Europe fédérale polycentrique semble utopique. Les gouvernements européens, pour leur grande majorité dans l’Europe à 15 (et plus encore dans l’Europe à 25), semblent complices de la lente décomposition de l’Europe dans une zone de libre échange, et de sa vassalisation à la puissance américaine. Quant aux citoyens européens, très peu ont conscience des enjeux de la construction européenne.

 

Les coopérations renforcées instituées par le traité d'Amsterdam, ou l’idée d’un noyau dur avec un cercle restreint de pays de l’Union européenne désireux de s’engager dans un projet commun, ne semblent pas permettre d’assurer une cohérence au projet d’Europe fédérale polycentrique, ce d’autant que toutes formes de pressions ne manqueront pas de s’exercer pour le contrer facilement, et maintenir l’Europe dans le cadre d’une simple zone de libre-échange. Ainsi, selon le projet de Constitution européenne, les coopérations renforcées doivent comporter au moins un tiers des pays membres (soit 9 pays minimum dans l'Europe à 25), et obtenir l’aval de la Commission et du Conseil des ministres. Autant dire qu’il sera très simple de bloquer toute tentative d’émancipation. On peut d'ailleurs noter qu'aucune coopération renforcée n'a vu le jour depuis 1997.

 

Il semble alors peut-être inévitable de construire deux Europes avec pour chacune un projet bien distinct selon que l'on privilégie la concurrence ou la convergence (sans aller jusqu'à une totale harmonisation), le libre-échangisme mondial ou la préférence communautaire, selon que l'on se place dans le cadre de la seconde ou de la troisième mutation :


·        L’Union européenne dans la lignée de Maastricht, Amsterdam et Nice (et de la Constitution européenne), avec peu de modifications institutionnelles, privilégiant le mode d’organisation intergouvernemental et le concept de gouvernance. Sa défense serait assurée par l’OTAN. La philosophie de cette Europe serait proche d’un impérialisme dans une version souple et modérée (un « nouvel impérialisme libéral » selon la formule du diplomate britannique Robert Cooper, ancien conseiller en politique étrangère du cabinet de Tony Blair et par ailleurs conseiller de Javier Solana, le " Monsieur PESC " et futur ministre des Affaires étrangères de l'UE par décision prise en mai 2004), en comparaison à la forme dure adoptée par l’administration américaine de Bush. Cette Europe est le fer de lance du libre-échangisme mondial.


·        L’Europe fédérale polycentrique avec les réformes économiques et institutionnelles décrites ci-dessus. En accord avec la finalité de l’Europe, les véritables critères de convergence de cette Europe se situeraient  au niveau cosmopolitique. En avançant de concert sur la base de cette vision cosmopolitique, les gouvernements retrouveraient leur mission, celle de préserver les intérêts des peuples, conformément à la charte des Nations Unies, ce qui implique par exemple de renoncer à des opérations de propagande ou de manipulation pouvant faire croire à près d’un américain sur deux que Saddam Hussein est responsable des attentats du 11 septembre, qu’il soutient directement Al-Qaida, et détient des armes chimiques et biologiques dont il peut faire usage « en quarante-cinq minutes » (en outre, ces mensonges et manipulations décrédibilisent totalement la lutte contre le terrorisme). Cette Europe serait un modèle pour construire un monde solidaire structuré en grands ensembles régionaux.

 

Ces deux Europes seraient réunies, avec l’Association européenne de libre échange (AELE), au sein de l’Espace économique européen (EEE). Cette coexistence entre deux Europes serait similaire à la situation de 1960 où l’AELE concurrençait la CEE.

 

Dans tous les pays d’Europe se déroulerait un referendum où chaque citoyen se déterminera sur l’un ou l’autre projet d’une part, ou une confédération d’autre part où chaque État garderait sa totale indépendance.

 

Si par contre l’Europe s’en tient à un simple élargissement et au Traité établissant une Constitution, on peut craindre la fin de l’aventure européenne.

 

 

Le déficit démocratique

L’Europe et la conjonction des opposés

Les fondements de l’Europe

Finalité de la construction européenne

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